Né le 12 juin 1925 à Étampes, rue du Haut-Pavé, Daniel Rebiffé est un survivant des bombardements d’Étampes et un des rares qui peut encore témoigner de l’Histoire de notre commune. Toujours en forme à 98 ans, il évoque avec émotion ses souvenirs d’Étampes et son parcours sportif extraordinaire, qui l’a mené à intégrer la Garde Républicaine de Paris et à participer au relais de la flamme olympique des Jeux de Londres en 1948.

« Les Nazis avaient imposé à la Municipalité durant l’Occupation de faire faire du sport aux jeunes de 15 à 18 ans une fois par semaine au stade du Pont de Pierre. Je n’avais jamais mis les pieds sur un stade mais j’ai bien été obligé de faire du sport, comme tout le monde », explique-t-il.

Cette mesure poussa à la fusion de deux groupes sportifs qui entretenaient à l’époque une forte rivalité : l’Espérance Étampoise et Les Enfants de Guinette. Ce rassemblement donna ainsi naissance à l’Olympique d’Étampes, dont Daniel Rebiffé fut l’un des instigateurs avec notamment René-Jouanny, puis au C.O.M.E (Club Olympique Municipal d’Étampes). Cet organisme permit une forte tendance sportive dans l’ancienne Cité Royale, de nombreuses disciplines y étant représentées (athlétisme, natation, basketball, etc.).

« S’il n’y avait pas eu cette fusion, l’Olympique d’Étampes ne serait pas né et n’aurait pas permis une synergie qui a rassemblé tout le monde, pour le plus grand bien. Nous avons fait un vrai club qui a reçu des titres régionaux dans plusieurs disciplines. Tout cela grâce à cette union, hélas due à des événements étrangers que nous ne pouvons que déplorer. J’ai donc fait du basket, du culturisme… Puis un jour, une course fut organisée. Ça m’a plu, j’ai pris le départ et j’ai fini 2ème  derrière le leader local. Nous avons ensuite créé une équipe de Cross-Country et nous avons participé à de nombreux championnats inter-régionaux. »

En parallèle, Daniel Rebiffé a également pris part à l’entraînement de l’équipe féminine de basket de la commune, et a aussi joué un rôle dans la troupe de Jazz Symphonique Pol Roger entre 1943 et 1945.

« Un jour, nous avons rencontré en match par équipe la Garde Républicaine de Paris, j’ai donc eu la chance de rencontrer leurs meilleurs coureurs et je les ai battus. L’entraîneur est ainsi venu me trouver et m’a proposé d’intégrer la Garde Républicaine. J’avais 19 ans à l’époque. J’ai accepté et j’y ai passé quelques années. J’ai ensuite été remarqué avec quelques-uns de mes co-équipiers pour porter le flambeau olympique, de Genève au Luxembourg. »

Du 25 au 27 juillet 1948, le cortège de 25 coureurs s’est relayé pour porter la flamme olympique, escorté de 2 motards à l’avant et à l’arrière, de deux autocars, ainsi qu’un représentant du comité olympique anglais.

« Tous les 3 – 4 km, nous nous relayions pour transporter ce flambeau. Nous avons traversé tout un tas de régions où nous étions magnifiquement reçus. Lorsque nous arrivions dans une ville, c’était généralement les sportifs locaux qui portaient la flamme durant le parcours et nous récupérions le flambeau à la sortie des communes. Pendant 3 jours et 3 nuits, chacun d’entre nous a couru entre 50 et 60 km, dans des conditions très difficiles puisque, la Fédération n’ayant pas assez d’argent, nous n’avions reçu aucun matériel. Puis, lorsque nous avons remis la flamme aux luxembourgeois, nous sommes chacun repartis avec l’un des flambeaux offerts par le comité anglais ».

Daniel Rebiffé est à ce jour le seul survivant de cette équipe française de 25 relayeurs et garde précieusement ce flambeau olympique.

Toujours prêt à faire vivre la mémoire de ses anciens collègues et à transmettre son histoire, il est intervenu à plusieurs reprises auprès de la jeune génération pour perpétuer le Devoir de Mémoire et promouvoir le sport.

« Lorsqu’on m’a demandé ce que je pouvais conseiller aux jeunes, j’ai répondu : faire du sport, quel qu’il soit, sans penser à l’argent. Si l’argent vient après, tant mieux, mais faire du sport avant tout pour se sublimer, pour avoir un but. C’est extraordinaire. Ça fait du bien ».

C’est avec un immense plaisir que Daniel Rebiffé a appris le passage de la flamme olympique à Étampes, le 22 juillet 2024.

« Quand j’ai vu ça, je me suis dit : est-ce que je vais avoir la chance de vivre jusque-là ? Et j’ai aussi pensé quel bonheur cela serait de pouvoir réunir, ne serait-ce que quelques instants, la flamme de 2024 et celle de 1948. Que des sportifs de plus de 80 ans d’écart soient rassemblés lors d’un moment symbolique. Jusqu’à présent, tous mes efforts pour essayer de convaincre les organismes officiels, les journaux et les chaines de télévision ont été vains. Personne ne m’a répondu. Il a fallu que quelques personnes aimables se souviennent de moi pour pouvoir en parler. Je ne demande pas à porter la flamme mais j’aurais tellement aimé que les deux flambeaux soient réunis un moment, en particulier dans ma ville natale à Étampes », conclut-il, prêt à venir le 22 juillet prochain.